Pour changer, parlons de moi… Grâce à ton vote et à un jury exceptionnel, je suis une des gagnantes de l’énoooooorme concours de Manu, et j’en suis très fière : je vais pouvoir bientôt préparer des petits déjeuners dominicaux sur un service fait pour ! Merci Manuuuuu !!!
Autre chose, mais ça parle encore de blog et de mangeaille.
Julie & Julia de Nora Ephron fait partie de ces films pour lesquels j’ai peu d’attentes voire des réticences : battage médiatique, « produits » dérivés (deux livres en l’occurence), une actrice connue pour tenir la tête d’affiche, une histoire mielleuse. Et surtout, le Paris de carte postale. Mais parfois, m’attendant à rien ou au pire, je me laisse prendre par le film et surtout… par ce qu’il me dit à moi.
Pour te faire une idée ? Une arrivée fortuite et hésitante dans le monde des blogs. Un pas en avant nécessaire pour tracer une ligne dans sa vie, poser des limites, avoir le sentiment de construire quelque chose par l’écriture quotidienne. L’intérêt sans faille de l’estomac et des papilles pour la nourriture. L’impression de dépendance liée à la fuite, au claquage de porte, d’un travail pour l’Etat qui ne convient pas, ne satisfait pas et n’arrive à rien. La naïveté de croire à certaines ouvertures, la déception et la rage quand elles se ferment, la joie quand les choses se font. L’implication dans le blog, les blogs, l’écriture. La vie à Paris, et le départ pour des lieux différents, complexes, inattendus, insécurisants, passionnants. L’âge aussi, l’approche de la trentaine. Et si tu connais mon prénom, tu comprends mieux la proximité que j’ai ressenti avec les deux personnages, mais surtout un, tout au long du film…
Inspiré d’une histoire vraie, le film évoque ce moment dans la vie de Julie où, malheureuse dans son travail qu’elle prend trop à coeur et pas assez professionnellement, décide de bloguer sur un défi pour donner du sens à sa vie. En un an, tester toutes les recettes d’un ancien livre de cuisine à succès aux Etats-Unis, Mastering the Art of French cooking de Julia Child. La Ginette Mathiot de l’Outre-Atlantique…
En parallèle, l’histoire de ladite Julia Child, une Américaine, fonctionnaire et épouse de fonctionnaire de l’ambassade, qui décide dans les années 1950 de se plonger à fond dans la cuisine française et de rédiger avec des amies un livre de cuisine française pour les femmes américaines. Fantasque, étrange personnage, drôle aussi et tendre ; un tel amour de la nourriture, également, que l’on ressent moins chez la blogueuse (qui boit en revanche à tout va. D’ailleurs, dans tous les films et séries américains, on cuisine en buvant du vin rouge en même temps : « so french, so italian » croit-on…). Julia elle se plonge avec délices dans les goûts et les saveurs, et tâtonne, teste, essaie pour ensuite transmettre ce qu’elle sait, ce qu’elle aime et ce qu’elle veut faire aimer aux autres.
Je ne dirais pas que Julie & Julia est le meilleur film de l’année, mais il m’a plu pour ce qu’il est : une comédie mignonne sur un fond un peu niais, racheté par deux très bons acteurs. En revanche, on n’y voit à mon goût vraiment pas assez de plats et de recettes, et l’intrigue se focalise un peu trop sur Julie, la blogueuse, qui joue plutôt bien mais force progressivement le trait pour donner une tonalité comique très conventionnelle parfois inutile, voire qui dessert l’ensemble. Meryl Streep est étonnante, juste dans le corps, dans la voix, dans le jeu. Elle imprime un rythme tout particulier, et est servie par un excellent Stanley Tucci, qui joue Paul, son mari, extrêmement touchant (oui, le jeu de mots est magnifique), aussi raisonnable et calme qu’elle est exubérante. Tiens, cela me rappelle aussi quelqu’un…
Très drôle, très ironique aussi, que de voir ce film en Inde : des images où l’on dépiaute allègrement un canard, où l’on ébouillante un homard, où l’on déguste une sole meunière et où l’on prépare un boeuf bourguignon alors que beaucoup dans la salle sont végétariens et ne toucheraient à un poil de bovidé, et qu’aucun (vu le succès des places « chères » et le parterre totalement vide…) n’a jamais touché une marmite de son petit doigt. Plus délicieux encore, le fait qu’un certain nombre de dialogues et d’expression soient en français, plutôt bien prononcé à part le décevant « bouf fourguignon » (bouffe ? Hihihi !), non sous-titrés. Hinhinhin…
Ce film vient finalement illustrer à merveille la phrase du chef américain Anthony Bourdain que je citais il y a peu : « as soon as you pick up a chef’s knife and approach food, you’re already in debt to the French » (Kitchen Confidential…).